lundi 27 septembre 2010

les feuilles de thé

J'avais laissé  toute une journée  infuser les feuilles de thé au fond du bassin. Je les ai récupérées et posées à terre. Elles se sont laissé lire  comme du marc de café.  Je suis restée muette devant l'oracle. 
Devant moi, l'immensité du désert.
10 000 m est une limite symbolique dont je ne maitrise  pas  le sens.   Je suis obligée de suivre ce corps en voie de consolidation et seulement lui.  Je sors d'un camp de concentration intérieur  et refuse d'entrer dans d'autres; le boulot stupide, les relations amicales restrictives ( cf repas entre potes ), l'idéologie de la terreur économique et sociale . 
J'ai peur de ma radicalité mais je suis contrainte de suivre ce chemin. La machine est en route, il n'y a pas de  marche arrière possible.

Je me souviens,  il y a quelques années, j'ai fait le  rêve  suivant : dans le métro, posé sur le quai,  un carré d'un m2 environ, haut d'un vingtaine de cm et  contenant une poudre blanche éclatante  ( plutôt chaux ou plâtre). Cette blancheur délimitée s'imposait à moi. Je ne faisais pas de travaux à l'époque .. donc pas de remontée du ras le bol des auges de chaux ou de plâtre . J'ai donc laissé le rêve dans ma mémoire, sans plus. 
Une semaine plus tard,  dans un cadre professionnel , je vais au musée Albert Kahn à Boulogne. Je me ballade dans l'expo temporaire, au sujet de je ne sais quelle tribu d'Afrique..  et tombe nez à nez avec une photo de  ce carré blanc rempli de cette même poudre,  du  kaolin. La légende  " l'homme face à son destin". Drôle d'effet. choquant.
On est toujours face à son destin , c'est vrai. dans le  métro,  au boulot, en dormant, en rêvant.
Le choc provenait de la violence de la simplicité , carré rempli de cette blancheur aveuglante, la violence du "je ne veux/peux rien savoir".
Je me sens sans temps,  même quand je bossais , je me sentais sans temps. Hier, aujourd'hui, demain, s'ils ont un sens domestique, social, n'ont pas de sens inconscient. Ce qui m'a sauvé est sans temps. Je travaillais en parallèle de moi sans le savoir, je ne voulais rien savoir. j'ai ramé comme une malade pour survivre,  souvent à contre courant pour ne rien savoir.
Ce matin , j'ai la sensation d'avoir les pieds plantés dans ce carré blanc qui s'étend à l'infini, devant, derriere, sur les cotés. Il n'y a pas de temps et le parcours est infini. ça me file le vertige. Je sais qu'aller nager ne me servira a rien.  Autre chose se met en route; autour du désespoir de la perte, du manque à mourir, des limites et de l'intégrité. Il me faut impérativement  affronter ces  ténèbres blanches . 
Je vais aller faire des courses parce que mon frigo, blanc du dehors et  du dedans,  est vide à l'infini. Quelques fois, il est bon  et nécessaire de s'accrocher à du basique matériel. J'ai une liste grande comme ça de bonnes choses à me procurer. J'ai l'impression que je me  prépare à passer l'hiver dans ma tanière comme dans un fort retranché.

3 commentaires:

  1. C'est une vie d'amour absolu qui ne demande rien en retour et qui a bien raison

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  2. ouai .. j'aime bien aussi un peu de retour, ça fait du bien

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  3. Vous ne connaissez pas les retours encombrants, ceux qui vous pèsent et accentuent votre malaise ? Quelle chance !

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